mercredi 14 octobre 2020

Le code couleur de la CAQ


Depuis le 8 septembre, le ministère de la Santé du Québec a mis en place un système régional de paliers d'alertes avec des couleurs « flashy » du genre de celles de la météo. Un peu comme les alertes de risque terroriste des années Bush, aux États-Unis. Sur la base de couleurs bien intuitives (du vert au rouge), on veut signifier au bon peuple qu'il doit plus ou moins s'inquiéter de la progression de la Covid-19 dans sa région et ainsi lui indiquer la marche à suivre.

L'idée n'est pas si idiote que ça et c’est loin d’être la première fois qu’elle est utilisée, mais le fait que les couleurs jaune ou orange soient sans grande conséquence, au-delà de celles qui étaient plus ou moins déjà en place, et que le rouge de « l'alerte maximale » ne touche en définitive que les bars et restaurants (le reste est anecdotique), me laisse perplexe. Une situation comme celle du printemps dernier, nécessitant un confinement et un arrêt de la production, serait donc de quelle couleur ? Rouge foncé, mauve, pourpre, noir … Rose ?

En fait, le code de couleur actuel, comme celui pour le terrorisme, est un code qui semble plutôt viser le niveau de stress que le gouvernement entend cultiver dans la population, mais ne représente pas une situation de risque sanitaire maximale pour autant. En réalité, on vit toujours comme avant dans les zones rouges. On a toujours droit aux services religieux, aux centres d'achat, à la salle de gym, etc. Tout ce qui touche la consommation est bien sûr maintenu en l'état ! 

Comme de bien entendu, tout le monde est appelé à aller au travail, à l'école et à consommer comme avant, malgré la « rougeur » de sa région. En somme, les seules activités annulées sont celles qui touchent les activités culturelles et sociales, celles accessoirement jugées peu importantes par les penseurs libéraux, mais qui ont le malheur de faire baisser le niveau de stress et de rendre la vie plus belle. Un peu comme si le gouvernement croyait que le stress était un bon conseillé et améliorerait le respect des mesures sanitaire, car, avouons-le, si une soirée au restaurant ou au cinéma comporte bel et bien un risque de contracter la Covid-19, il en va de même pour le travail ! La seule différence est que l’un est jugé « indispensable » et l’autre « accessoire » dans un cadre de crise économique émergente et de pandémie qui s’éternise.

Je sais bien que la Covid-19 est une maladie sérieuse, qu'il faut faire attention et être responsable, mais le fait d’alimenter artificiellement la peur avec des mesures de matamore ne me semble pas la meilleure idée, puisqu’il nous faut bien accepter de penser la gestion de la Covid sur le long terme et non plus comme une crise passagère.

Je comprends bien que le taux de reproduction du virus est remonté au-delà de 1 (c’est-à-dire que le nombre de malades augmente dans la population) depuis août et que l’arrivée de la saison des rhumes est à notre porte. Mais ce climat anxiogène ne doit pas être alimenté inutilement, puisque la situation est appelée à rester.

De plus, n’oublions pas que tout ce qui est à l’origine de cette pandémie (mouvements de population, destruction des écosystèmes, concentration des populations, etc.) n’est, non seulement, pas en voie d’être résolus, mais sera probablement intensifié par les politiques de relance. 

Au lieu de faire croire aux naïfs qu’ils essaient de « sauver Noël », il serait peut-être temps de dire les choses franchement et de cesser de materner la population comme le gouvernement le fait depuis le début de la crise. Si le gouvernement veut un peuple solidaire et discipliné, il doit le considérer comme tel et ajuster sa communication et ses politiques en ce sens. C’est-à-dire, en misant sur la transparence et l'éducation, mais surtout en cessant de jouer la verticalité, via la politique du « bon père de famille », et en tenant davantage compte de l’expérience acquise par ceux et celles qui tiennent la société à bout de bras. 

De cette façon, les mesures seront pondérées à la réalité médicale et ne passeront plus pour autocratiques, ce qui serait le meilleur remède à l’actuelle pandémie de délire conspirationniste, qui elle aussi a un taux de reproduction inquiétant ! 

Benedikt Arden, octobre 2020