Cela s’est passé le 7 janvier dernier et c’était
malheureusement prévisible depuis longtemps. Un commando armé a perpétré un charnier
dans les locaux du journal satirique Charlie Hebdo faisant douze morts sur le
coup ainsi que plusieurs blessés. Selon les témoins, les auteurs de l’attentat
auraient scandés « nous avons vengé le prophète », « Allahu Akbar », ainsi que quelques autres énoncés du même type.
Ce qui, pour les médias, ne devait pas laisser grand doutes sur l’identité de
ses auteurs, étant donné que le journal était depuis longtemps l’un des fers de
lance de l’anti islam version gauchiste.
Comme vous le savez peut-être, les principales victimes de
cet attentat, soit les dessinateurs et journalistes de Charlie Hebdo, ne sont
pas totalement sans responsabilité dans cette affaire et leurs multiples
provocations à l’égard d’une population qui se radicalise depuis longtemps n’étaient
pas sans risques. D’ailleurs, l’incendie criminel qui eut lieu dans leurs
locaux en 2011 ne semble pas à l’époque avoir été pris suffisamment au sérieux.
Car loin de freiner leurs ardeurs, cela les a de toute évidence affirmées dans
cette voie risquée. Dans cet ordre d’idée, certaines mauvaises langues sont
même allées jusqu’à prétendre que les intéressés n’étaient pas étrangers à cet
événement, car s’étant sortis de cette affaire plutôt avantagée en terme
financier[i] et
médiatique[ii].
Enfin, même si le fait d’être des martyrs apporte quelque chose de romantique
vu de l’extérieur, il n’en demeure pas moins que de le devenir réellement n’est
pas l’apanage de tous, alors il serait plutôt inutile de considérer une volonté
en ce sens dans le cas qui nous concerne. Mais enfin, poursuivons.
Tous ceux qui connaissent un peu la réalité du monde et son
évolution auront tôt fait de comprendre que le risque d’attentats de ce type
dans les divers états occidentaux, mais surtout en France, était une réalité à
craindre. Mais voilà que comme une traînée de poudre cette situation rendra
sans doute les tensions sociales encore plus difficiles dans les pays à fort
taux d’immigration musulmans. Cela engendrera
probablement des conséquences très nocives partout où le même terreau
sociologique est cultivé. Partout en occident, mais aussi ici où nous avons
déjà morflé récemment, sera peut-être le cadre d’un prélude à la guerre civile.
Car, même si nous avons du retard et que le québécois moyen est plus passif et
ouvert qu’à bien des endroits dans le monde, il se trouve que les mêmes
processus sont en court. Ensuite, avec les effets négatifs des débats sur la
« charte des valeurs », l’omniprésence d’une droite islamophobe et
d’une gauche moralisante incapable de sortir des slogans, la situation ne
risque pas de s’améliorer, car tout ça participe à la situation présente.
Comme je l’ai déjà évoqué, la question des processus qui
nous ouvrent la voie vers la guerre civile n’est pas si obscure que cela,
malgré l’apparente incapacité qu’ont les politiques à faire comprendre les
raisons de son développement ainsi que ce qui devrait être fait pour que cela cesse
d’empirer. Car il n’est pas difficile de comprendre que de blâmer les
populations d’accueils (comme le fait trop souvent la gauche) ou les immigrants
(comme le fait trop souvent la droite) de tous les maux n’ont pas d’autre
conséquence que d’empirer la situation. Car quand l’on stigmatise les musulmans
en même temps que le reste de la population au nom des fractions inverses, il
s’avère que l’on génère des antipathies qui finissent tôt ou tard par ce genre
d’acte barbare. En somme, les deux discours se complètent dans ce qu’il y a de
plus nocif si nous voulons construire une société de paix.
Le plus grave problème dans ces funestes événements, c’est
qu’au moment même où il faudrait réfléchir à la complexité de la situation et
aux moyens concrets d’un changer de cap, la petite politique en profite
toujours pour surenchérir dans la démagogie au plus chaud de la situation,
histoire d’en profiter électoralement. Ce qui risque bien d’engendrer une
contre-offensive qui pourrait être le début de graves conflits
intercommunautaire. Ce qu’il faut à tout prix éviter, car ce type de conflit
(l’actualité du monde nous le démontre tous les jours) ne peut aboutir à aucune
victoire et c’est la société dans son ensemble qui en serait la victime.
Mais enfin, que
seraient les moyens à prendre pour opérer un tel changement de cap? Me
demandera-t-on. Afin d’y répondre, essayons, sans aller trop loin, de prendre
un peu de hauteur afin de repenser ce qui se passe globalement et qui n’est
pratiquement jamais mis en perspective par les grands médias.
Depuis un certain temps déjà, les Américains et leurs alliés
utilisent à grande échelle ce que l’on appelle des stratégies de subversion (ou
guerre
de 4e génération) afin de renverser les gouvernements d’états
conçurent sans toutefois les envahir directement. Cette stratégie est très
efficace sur tous les plans, car en plus de ne pas avoir à répondre des
accidents ou bavures collatérales que ces combats impliquent, cela permet
surtout de réduire les coûts à presque rien. Tout ce qu’il faut c’est de
repérer les groupes d’oppositions déjà existants[iii],
leur donner quelques formations via les organismes liés à la NED[iv],
de les armer discrètement et de dorer leur image dans les médias occidentaux[v].
Sans retourner aux plus anciennes entreprises de subversion, notamment celles
en Afghanistan[vi]
qui ont donné (oh surprise!) Oussama Ben Laden, rappelons-nous des quatre
dernières années où l’on a vu tomber la Libye et la Syrie, à un poil près.
L’objectif principal étant de mettre à mal des états concurrents, l’aide
apportée à ceux qui se battent contre lui laisse aisément comprendre pourquoi
de tels groupes sont soutenus (quand ceux-ci sont soi-disant combattus sur le
sol occidental), car étant les premiers à vouloir détruire des états modernes
issus du nationalisme arabe. Le gros problème, c’est que les milices islamistes
recrutent non pas uniquement chez les musulmans des pays concernés, mais aussi
dans le monde entier. Ce qui inclut les pays à haut taux d’immigrants de
confession musulmane, autrement dit chez nous.
Il est de notoriété publique que l’État français, même
socialiste (sic), est aujourd’hui un grand pourfendeur des
états visés par l’oncle Sam. Et par ses prises de position parfois
ridicules[vii],
il incite bien des jeunes à la guérilla contre des états comme la Syrie. Et
comme un malheur n’arrive jamais seul[viii],
il arrive parfois que ces jeunes reviennent avec des connaissances militaires
quelque peu perfectionnées[ix].
Ce qui est un problème de sécurité criant quand le pays vit des tensions
interconfessionnelles comme c’est le cas en France. Et si vous ajoutez à cela
la démagogie qui d’un côté blâme les immigrants de tous les maux et de l’autre,
leurs compatriotes (via le discours victimaire). Il est fort à croire qu’un
jour ou l’autre il finira bien par y avoir confrontation !
Alors que faire? D’abord et avant tout, ne pas souffler sur
les braises et mettre fin à la démagogie. Ensuite, éviter la tentation du bouc
émissaire et condamner TOUS ceux qui ont des responsabilités dans la montée des
tensions afin de mettre en place les conditions d’un dialogue entre gens de
bonne foi. Ce dialogue pourra donc être le départ d’actions concertées qui
auront pour objet d’agir à la base de ce qui a causé les problèmes que nous
vivons aujourd’hui. Soit ces conflits désastreux au Moyen-Orient ainsi que tout
ce qui a trait aux luttes horizontales engendrées par le multiculturalisme,
cette idéologie anglo-saxonne intrinsèquement raciste et vectrice de conflit.
Dans le présent contexte, tous ceux qui jettent de l’huile
sur le feu devraient se rappeler le dicton « qui sème la misère récolte la
colère », car, même si je ne remets pas en cause la liberté d’expression
de Charlie Hebdo, je crois que la situation est suffisamment grave pour en
appeler à un effort collectif de réconciliation. Il y a beaucoup trop de gens
(des deux côtés) qui en appellent au conflit pour prendre cette situation à la
légère et comme il est encore temps d’éviter le pire, tous devraient s’unir sur
les plus petits dénominateurs communs afin de mettre à bas ceux qui sont à l’origine
de ces tensions et qui profitent de cette division pour se maintenir au
pouvoir.
Benedikt Arden
[i]
Car ayant reçu des avantages importants en retours d’assurances.
[ii]
Par l’image de martyr de la liberté que cela leur rapporte.
[iii]
Tout état compte un nombre assez varié de groupes d’opposition qu’il est facile
de repérer et de financer.
[v]
Les insurgés sont notamment toujours considérés comme des rebelles de la
liberté, même si ces mêmes personnes étaient perçues ici comme des terroristes.
[vi]
Guerre de subversion visant indirectement l’URSS et qui consistait dans l’essentiel
de soutenir les groupes islamistes radicaux afin de déstabiliser le
gouvernement prorusse d’Afghanistan.
[vii]
Comme la reconnaissance de l’Armée syrienne libre (ASL) alors même qu’elle
n’est pas au pouvoir.
[viii]
Inciter indirectement les jeunes musulmans à aller faire la guerre par l’état
n’est pas une bonne chose en temps normal, même si bien des gens peuvent avoir
des motivations tout à fait compréhensibles de le faire.
[ix]
Selon les informations
que j’ai reçues lors de la rédaction de ces lignes (cela pourrait bien
changer), le commando aurait été formé dans le cadre de la guerre civile en
Irak.