jeudi 14 novembre 2013

Déclaration d'appui du PCQ au projet de loi 60

Le Comité Exécutif Central du PCQ a convenu, par un vote unanime, plutôt la semaine dernière, de donner son appui au projet de loi 60, portant sur la création d'une charte québécoise sur la laïcité.

Le PCQ convient que le projet de loi, tel que déposé par le gouvernement de madame Pauline Marois, est encore loin d'être parfait.  N'aurait été que de nous, nous aurions encore changé plusieurs choses.  Une chose demeure.  Ce projet, même dans sa forme actuelle, demeure de très loin souhaitable au maintien du statu quo sur les questions de laïcité au niveau des services rendus par l'État québécois.

Il est encore difficile de savoir ce qui adviendra de ce projet de loi.  Ultimement, il pourrait encore y avoir certains changements, de manière a permettre son adoption à l'Assemblée nationale.   Nous, au PCQ, aimerions que le projet de loi soit effectivement bonifié encore plus, mais nous sommes malgré tout prêts à l'appuyer, y compris dans sa forme actuelle.
Le Comité Exécutif Central du PCQ convient également  des conclusions suivantes :

1.  Énormément a été dit et écrit sur le sujet, souvent à torts et à travers.  Il est totalement faux de prétendre que ce projet de loi est de nature raciste ou xénophobe.  Le fait de vouloir restreindre le port dans la fonction publique de signes religieux ostentatoires ne peut d'aucune manière être identifié comme étant l'équivalent de vouloir restreindre l'exercice du droit de tous et chacun à pratiquer leurs croyances religieuses ou d'en pratiquer aucune.

2.   La liberté de religion est une question d'ordre privée.  Aucune religion, que ce soit la religion catholique, juive, ou mulsumane, pour ne mentionner que celles-ci, n'exige de la part des fidèles de porter tels ou tels signes.  Au mieux cela relève d'interprétations des uns ou des autres, lesquelles ne sont par forcément suivies par d'autres.  De vouloir faire tout un brouhaha, sur cette question, relève de la démagogie.  Les références au fait que cela serait une négation de droits fondamentaux ne tient pas la route non plus.

Nous sommes particulièrement choqués du fait que certaines forces politiques, reliés notamment  au Parti libéral, cherchent actuellement à se servir du débat actuel pour ramener par la porte d'en arrière leur vieux projet de multiculturalisme.  C'est également une manière déguisée pour essayer d'empêcher le peuple québécois de se prendre en mains, ce qui implique entre autres choses de se servir de l'appareil d'État pour légiférer sur les sujets nécessaires.

3.  Nous reconnaissons le fait que cela puisse aller à l'encontre de la Charte canadienne des droits et libertés qui stipule, soit dit en passant, la suprématie de Dieu, sur toute autre loi; mais pour nous, cela n'a pas vraiment de valeur.  Au pire, et advenant que la Cour suprême déclarerait la loi 60 comme étant anti-constitionnelle, d'un point de vue canadien, alors le gouvernementr du PQ serait en droit, de notre point de vue, d'utiliser la clause dérogatoire.
Le projet de loi 60 heurte de plein fouet l'idéologie voulant que les droits des individus doivent être nos seules préoccupations, nonobstant l'impact qu'une telle approche peut avoir sur l'ensemble de la société.  C'est une approche qui ressemble à bien des égards à l'idéologie libertarienne et aux discours de droite ou d'extrëme-droite aux États-Unis, lesquels sont régulièrement utilisés pour tenter d'empêcher tout correctif législatif, de l'autre côté de la frontière, et visant à traiter plusieurs des excès propres à la société américaine, comme sur la question des armes a feu.  Nous ne soucriverons jamais à un tel discours.
 
4.  Bon nombre d'employés de l'État, y compris au sein du réseau de la justice, des services correctionnels et de police, mais aussi au sein du réseau de la santé, de même qu'au niveau municipal, et des transports publics, ont d'ores et déjà un code vestimentaire à respecter.  Les clauses inclues dans le projet de charte, touchant au port de signes religieux ostentatoires, ne font finalement que bonifier ce code.

5.  Nous, au PCQ, n'étions pas au départ de ceux et de celles qui pensions que de telles clauses, concernant les restrictions au port de signes religieux, étaient nécessaires en soi.  Pour nous, il y avait d'autres questions à régler bien avant cet aspect du dossier.  Nous n'étions pas non convaincus de l'utilité, au départ, d'aller trop loin à ce niveau.  Nous étions également préoccupés de l'impact possible que de telles mesures pourraient avoir, d'autant que de telles mesures ne faisaient pas, et ne font toujours pas consensus, notamment au niveau de la grande région de Montréal, et ne seront de toute manière pas facile à faire appliquer.

Nous avions également de nombreuses critiques face au concept même de '' droit de réserve '' que les employé-es de l'État devraient respecter et nous les avons toujours.
 
6.  Force nous est de constater en même temps que les choses, avec le temps, ont fini par déraper encore plus.  L'adoption d'une charte, même imparfaite, devient plus que jamais une urgence, de manière à envoyer un message très clair sur le fait que la laïcité des services donnés par l'État est non seulement un acquis non négotiable, mais que le renforcement de ce caractère laic est aussi un incontournable.

De même, nous joignons notre voix à tous ceux et celles qui dénoncent déjà l'actuelle campagne de Quebec bashing.

7.  Nous nous opposons également au discours voulant que tout ce débat serait un '' faux débat '', qui nous détournerait des '' vraies questions ''.  Nous sommes bien conscients du fait qu'ilù y a un certain nombre de gens, à gauche, y compris au sein de Québec solidaire, qui pensent ainsi.  Nous trouvons cela très déplorable.  Cela ne contribue pas à combattre certains préjugés plutöt tenaces, notamment contre Québec solidaire.  Cela tend à démontrer, jusqu'à un certain point, un manque de maturité toujours bien présent, dans certains de ces milieux.

8.  Est-ce que cette tendance, propre à certains milieux de gauche, identifiable à une tendance à l'extrême-gauchisme, serait le résultat du fait que la gauche fut trop longtemps enfermée dans une marginalité plutôt étouffante ?  C'est possible.  Cela a peut-être contribué à renforcer certains défauts dans ces mêmes milieux.  Nous, pour notre part, n'encouragerons jamais une telle approche qui ne pourrait nous amener autrement que vers un retour à une autre forme de marginalité.

Nous ne comprenons pas non plus comment des gens de gauche peuvent ultimement manifester dans la rues, côte à côte avec des gens très clairement de droite et défendant un point de vue très réactionnaire, pour s'objecter à un projet de loi qui recoit en même temps l'appui de sections déjà très larges de la société et qui ne pourraient être associées d'aucune manière avec des courants racistes ou xénophobes.  Cela fait un peu penser à l'attitude qu'a pris en 1995 certaines forces de gauche, lors du dernier référendum, et qui appelaient carrément à voter ... NON, au même titre que la quasi totalité du monde patronal.
 
9.  Chose certaine,  ce n'est certainement en agissant de la sorte qu'on démontrera sa capacité à pouvoir ultimement mieux gérer les rennes du pouvoir, ni non plus de convaincre les gens de la superiorité de notre programme.  Ce n'est certainement pas non plus en multipliant les excuses, servant à d'abord et avant tout à justifier sa relative inaction, soit disant parce qu'on ne voudrait pas se lier d'aucune manière avec des tenants de la droite politique, qu'on arrivera d'autre part à démontrer que la gauche à de meilleures solutions à proposer que cette même droite politique.

10.  Nous nous objectons également au discours voulant que le projet de loi 60 serait pire que le document déposé plus tôt, en septembre, par le ministre Drainville.  Pour nous, c'est plutöt le contraire, notamment en ce qui a trait aux dangers reliés aux clauses de retrait qui existaient au départ et qui n'auraient jamais dû exister.  L'ajout de mesures transitoires est également le bienvenu.  

Il en va de même pour ce qui est de la clause étandant les mesures non seulement aux employés relevant directement de l'État, mais également aux entreprises privées faisant affaires avec l'État, de même qu'à tous ceux et celles qui, tels les médecins, oeuvrent également dans le secteur public, tout en étant à leur propre compte.  Autrement, cela n'aurait pas été juste.

11.  Une fois adopté, cette charte, de même que les autres aspects de la législation et de la réglementation portant sur ces question, pourront encore être bonifiés plus tard.  Parmi les choses qui pourraient être regardées, mentionnons entre autres choses les points suivants : l'abolition des subventions aux écoles privées religieuses (nous sommes les seuls, ou presque, au Canada, à continuer de fournir de telles subventions), l'abolition des programmes de crédits d'impôts reliés aux organisations caritatives associées à des organisations religieuses (personne ne sait encore combiences crédits d'impôts coûtent aux contribuables québécois).  

D'autres questions, y compris la clarification de ce qu'il faudrait faire quand des écoles religieuses ne respectent pas la loi, comme c'est déjà le cas dans certaines communautés religieuses, telles la communauté hassidique, devraient aussi être réglées.
 
12. D'ici là, les autres aspects du projet de loi 60, portant sur un meilleur encadrement des accommodements '' raisonnables '', de même que sur une bonification de la charte québécoise des droits et libertés, deux aspects particulièrement importants du projet de loi, mais qui passent le plus souvent, jusqu'à présent, plutôt inapercus, devraient aider à améliorer la situation au niveau de la manière d'appliquer les principes de laïcité dans nos services publics.

13. Le fait que le gouvernement de madame Marois semble miser plus sur l'importance de coinvaincre,  que sur des mesures disciplinaires, pour faire appliquer ce projet de charte, au cours de la prochaine période, incluant l'importance accordée pour faire en sorte que la période de transition soit la plus douce possible, est une autre bonne nouvelle.

14.  Nous espérons enfin que le crucifix, à l'Assemblée nationale, sera le plus rapidement possible retiré de cette enceinte pour être replacé ailleurs, dans un endroit plus adapté pour celui-ci et qui reflète du même coup plus notre engagement collectif en faveur des principes de laïcité.

Par André Parizeau,
Chef du PCQ,
Au nom du Comité Exécutif Central du PCQ